En pleine croissance un peu partout dans le monde, le commerce en ligne rencontre pourtant, malgré une croissance et un développement certain, un grand nombre de contraintes dans notre beau pays. Diverses raisons entrent en jeu et constituent des freins du e-commerce, allant d’un retard certain du Maroc d’un point de vue infrastructurel, à un manque de confiance du marocain moyen envers le commerce électronique et toutes transactions commerciales ou services à distance.
Aujourd’hui, avec la stratégie numérique nationale E-Maroc, nous assistons à l’avènement d’une société de plus en plus tournée vers Internet et la consommation des produits du Web, ainsi que les nouvelles technologies. Inéluctablement, cet engouement a façonné, petit à petit le mode de vie des consommateurs Marocains, en impactant tous les aspects de leurs comportements et transactions, dont le commerce.
En effet, au cours de ces trois dernières années, notre pays a été particulièrement prolifique en termes de shopping en ligne. Au niveau des chiffres de l’année 2018, le Royaume a occupé la 5e place en Afrique en termes de ventes en ligne selon l’indice du commerce électronique d’entreprise à consommateur (B2C) de la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (CNUCED). Si en Afrique le Maroc se hisse au 5e rang derrière d’autres pays comme le Nigéria et l’Afrique du Sud en matière de taille de marché du commerce en ligne et des transactions commerciales par internet, il est passé de la 85e à la 81e place sur 151 pays évalués au niveau mondial. Ce rapport de la CNUCED se base sur le nombre d’acheteurs en ligne, le niveau de sécurité des serveurs et la facilité de paiement et de livraison.
Cependant, malgré cette croissance plus qu’honorable, le Maroc n’est pas encore arrivé à libérer le plein potentiel de cette croissance numérique, et développer ses transactions commerciales électroniques et son shopping en ligne, en raison de divers freins et obstacles du e-commerce.
Tout d’abord, il faut savoir que le Maroc recèle de fortes disparités entre zones, essentiellement entre zones urbaines rurales. Ces dernières, pour certaines sont encore aujourd’hui complètement isolées de tous les canaux d’information et de communication. La population rurale, représentant, au niveau des chiffres du HCP (Haut-commissariat au plan, NDLR) un peu plus de 13 millions de personnes, soit plus du tiers de la population du royaume, semble par conséquent privée des bienfaits apportés par Internet et les nouvelles technologies numériques, et par extension, du commerce électronique.
Vient ensuite L’analphabétisme, qui peut être considéré comme l’un des plus grands obstacles du e-commerce au Maroc. Au niveau des chiffres Selon le HCP, en 2014, le taux d’analphabétisme était de 32%. Ce taux qui, malgré une constante baisse depuis un demi-siècle, reste malgré tout alarmant, et touche majoritairement le milieu rural.
Les obstacles du e-commerce au Maroc ne se limitent pas à ces facteurs, il faut noter aussi qu’une certaine défiance vis-à-vis du paiement électronique et l’utilisation des cartes bancaires, toujours synonyme, pour une grande tranche de consommateurs qui n’ont pas confiance, d’arnaque, de fraude. Pourtant, bien que le Maroc dispose de toute l’infrastructure et l’organisation nécessaire pour assurer un niveau de sécurité quant au paiement électronique par carte bancaire et renforcer la confiance des clients, l’e-commerce peine à convaincre les consommateurs marocains à changer leurs habitudes et leurs avis sur les transactions commerciales électroniques notamment le paiement en ligne et l’utilisation de carte bancaire. A noter cependant que les sites E-commerce marocains et boutiques en ligne ont pu trouver un certain compromis en proposant à leurs clients la possibilité du paiement cash à la livraison sans devoir utiliser leur carte ou un moyen de paiement électronique. Si les chiffres sont difficilement vérifiables, le paiement cash à la livraison représenterait près de 95% du total des ventes qu’en boutique en ligne.
Malgré tout, le manque de confiance des consommateurs marocains vis-à-vis de l’achat en ligne et l’utilisation de carte bancaire prime toujours. Selon une enquête réalisée par le quotidien Libération sur un échantillon de 5820 personnes, 56,7% de ces personnes ne recourent pas à l’achat en ligne car elles préfèrent l’achat direct en magasin ou en boutique physique. Ainsi, la préférence est pour le commerce direct. Le consommateur aime se rendre sur le lieu de vente, manipuler et négocier ce qu’il achète. C’est un consommateur de proximité, et les habitudes ont la peau dure. Toujours selon l’étude, les marocains qui n’utilisent pas le e-commerce manquent de confiance et d’intérêt vis-à-vis de ces services en ligne et sont freinés par les obstacles du e-commerce au Maroc.
Il est à noter, tout de même, que la transaction de paiement par carte bancaire ne cesse de progresser dans notre pays. Depuis 2012, le paiement en ligne a augmenté de 60% selon les statistiques du Centre Monétique Interbancaire (CMI). Dans le détail, les sites marchands et sites des facturiers affiliés au CMI ont réalisé près de 9,8 millions de transaction de paiement en ligne via cartes bancaires, marocaines et étrangères, pour un montant global de 4,8 milliards de DH au cours de l’année 2019, en progression de +18,2% en nombre et +46,7% en montant par rapport aux chiffres de l’année 2018. Une progression largement favorisée par les grands facturiers, les compagnies aériennes et les services eGov. Selon l’ANRT, 12,8 % de la population aurait effectué un achat en ligne en 2017, un chiffre qui a doublé depuis 2015.
Du côté des investisseurs, nous remarquons, vu le nombre peu élevé de boutique de commerce en ligne au Maroc, que beaucoup d’acteurs, qui pourtant y gagneraient énormément, n’osent toujours pas sauter le pas, et recourir au commerce électronique. C’est un facteur qui peut être compté parmi les obstacles du e-commerce au Maroc. D’un côté, se trouve un manque de connaissances à ce niveau, conjugué à (malheureusement), l’incompétence de certaines agences Web marocaines, qui déçoivent dans leurs prestations, et font perdre des sommes non négligeables à ceux qui étaient prêts à investir, sans réel impact.
On peut également compter la logistique parmi les freins du e-commerce au Maroc. Il s’agit d’un problème rencontré de manière plus ou moins marquée dans tout le continent africain. Selon une interview, accordée en 2017 au journal Le Matin par Bastien Moreau, directeur général du célèbre site E-commerce Jumia Mall Maroc (Jumia est aussi présent aussi dans divers autres pays africains), l’une des principales contraintes rencontrées fut de trouver des partenaires logistiques à la hauteur, d’un point de vue tarifaire et qualitatif.
Ceci poussa Jumia à s’occuper elle-même de ce rouage vital, à coup d’investissements colossaux. Un autre facteur qui peut être compté parmi les obstacles du e-commerce au Maroc.